Larguez les amarres!

Larguez les amarres!

Jérôme Bergami, Oct 03, 2014

 11/09 On fonce, rentrée scolaire ou pas! Une école qu’il nous faut, pour célébrer, le partage. Vous avez oublié? Sans ça on ne quittera pas le territoire grec. La première, une primaire, nous ignore complètement. La directrice ne lève pas même un œil sur nous. « Tout ce qui entre dans l’école de l’extérieur doit recevoir l’approbation du ministère de l’éducation », fait-elle simplement dire à l’une des institutrices. Cet « extérieur » nous désigne-t-il, nous personnellement, ou bien la terre que nous présentons dans nos bourses?Quittant les lieux, et face à mon désarroi, Sabina insiste: « On ne baisse pas les bras. On va en trouver une. Même si ça risque d’être difficile aujourd’hui, on va en trouver une! » Difficile parce que nous sommes le onze septembre et qu’en ce jour de rentrée scolaire enfants, profs et parents sont en ébullition. C’est reparti pour un an, les cahiers, les cartables, les devoirs, la cantine, les punitions, les boites de craies, les bulletins, les sorties, etc. Pour notre seconde école, nous investissons un collège, le plus ancien de la ville. D’emblée nous sommes orientés vers la bonne personne et le contact passe. Olga, professeur de français enjouée, anticipe même notre demande: « Oui, vous voulez qu’on organise quelque chose avec les enfants, pour demain, oui, on va voir ce qu’on peut faire. Je vais demander l’accord de la directrice et du directeur, mais c’est très intéressant, je crois que les enfants seront très contents. » On a désormais un atout supplémentaire avec vous: notre article de journal. Nous le présentons. Olga en fait des photocopies, le fait lire à deux autres de ses collègues et reçoit dans la foulée le feu vert de la direction. Rendez-vous est fixe demain, 8h30, dans la cour de l’établissement.Le Voyage devrait être enseigné dans toutes les écoles. L’apprentissage de la vie a travers l’ailleurs; la confiance en soi par la rencontre, rencontre avec le différent, l’inconnu, l’autre.Toutes les écoles devraient avoir pour nom : « Larguez les amarres! » L’enfant ne doit-il pas censément quitter un jour ses parents, s’émanciper du nid familial? Mais il lui manque le plus souvent la manière pour le faire, et le goût. Quand ce n’est pas l’idée même. Aussi prend-il le bout de la rue pour un envol, la ville voisine pour une mise en orbite. «Je quitte la région! » et il monte à la hune. C’est Christophe Colomb scrutant les Amériques. « De Bretagne en Poitou? » Grand Dieu, les parents grondent : le vaste monde qui nous sépare! Oui, l’enfant croit s’élancer tandis qu’en vérité, le plus souvent, il s’échoue. Il est passe malgré lui à côté de quelque chose d’immense. Et personne autour de lui n’a senti que quelque chose d’immense ne se reproduirait pas.« Enfants! dira le professeur à ses élèves, je vous apprendrai l’errance, l’art exquis du vagabondage. Ma récompense sera que votre cœur frissonne à chaque fois que je prononcerai ce mot : VOYAGE. »