Boomerang
Jérôme Bergami, 23 juill, 2015
Je l’ai lancée, lancée loin, aussi loin que je pouvais.
Il y a de cela un long temps. Elle me revient.
Ne cherchais pas à m’en démunir, seulement à me narrer différemment, pour d’autres confidences.
C’était oublier le voyage.
Que le voyage était au coeur de sa substance. Premier peut-être en sa substance.
Aussi se mettre en partance était-ce la mettre en retour.
Je m’ouvre, comme une femme déjà conquise ;
repense à ces années ou j’en fus habité,
ces premières années de sécrétion quand un fils de tanneur fut mon Graal.
Encore j’en ressens le trouble. Â
Amis, femmes, parents, enfants, terre,
ce n’est pas que l’on n’aime plus
Mais l’on se détourne, parfois, un temps.
D’elle aussi, comme du reste.
La vie nous apprend.
A renaître aux escales.
Vouloir autre chose, c’est désirer le même mais dans une ombre inconnue.
Heureux celui qui voit le trésor dans sa main. Â
Je t’ai lancée, lancée loin, aussi loin que je pouvais. Rébellion.
Cabrements d’un coeur. Bunker de colères.
Qu’il dure à sécher le sang d’un soleil blessé sur les poitrines de neige.
Cependant tu reviens.
Mes doutes, mes ingratitudes, mes hypocrisies, mes lâchetés, mes attentes,     Â
au bout du compte ne sont que mon combat. A mener toi en moi.
Je m’expose,
et me fouette l’air frais que tu fends du lointain de l’exil où je t’avais expédiée.
Aussi neuve sur le terrain mûri,
aussi exigeante qu’aux premières fièvres,
tu me reviens.
Je te saisis,
la secrète des langues. Â